Eau

De Le Wiki du Brassage Amateur
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Construire son eau pourquoi comment


Pourquoi



La qualité de l’eau est un facteur particulièrement important pour le brassage tout grain. Une partie des réactions enzymatiques qui se produisent le font de façon optimale dans une fourchette de pH se situant entre 5.2 et 5.5, cette gamme de pH est également celle dans laquelle les tannins de l’enveloppe du grain ne sont pas extraits lors du rinçage.

Contrairement au raccourci tentant que font beaucoup de personnes ce pH n’a pas grand-chose à voir avec le pH de l’eau utilisée. Le pH qui est important est celui de la maishe

Le pH de la maishe doit être compris entre 5.2 et 5.5 a 65°C soit 5.4-5.8 a température ambiante (le pH diminue un peu avec la température). Le pH de la maishe est influence par 2 facteurs principaux :

- le pouvoir acidifiant du malt : du malt de base (pils) concassé mélangé dans l’eau distillée va amener le pH du mélange à 5.7. Plus le malt utilisé va être foncé plus le ph du mélange va être acide (4 avec de l’orge grillée). Cette acidification est principalement due aux phosphates contenus dans le grain. Pour simplifier on peut considérer le malt comme un acide faible.

- le pouvoir tampon de l’eau : ce pouvoir tampon est la capacité de l’eau a résister a un changement de pH. Cette capacité dépend de la concentration en ions avec un pouvoir tampon, dans le cas de l’eau de brassage le pouvoir tampon est lie à la concentration en carbonates/bicarbonates.

Cet équilibre entre pouvoir tampon de l’eau et pouvoir acidifiant de l’eau est assez bien explique dans le bouquin de John Palmer « how to brew » au chapitre alcalinité résiduelle (AR).
Il existe une feuille excel faite par John Palmer qui permet de calculer cette alcalinité résiduelle téléchargeable ici http://howtobrew.com/section3/Palmers_M ... _ver2d.xls

Pour illustrer : le pouvoir tampon de l’eau distillé est nul, une simple goutte d’acide va faire changer le pH de façon très importante. Dans une eau très riche en bicarbonates l’ajout de la même goutte d’acide n’aura aucun effet sur le pH.

Pour obtenir un pH idéal de la maishe avec un mélange de grains très clair (pils par exemple) il faudra une eau peu tamponnée (pauvre en bicarbonate libres), ou réduire le pouvoir tampon de l’eau utilisée. Ainsi malgré un pouvoir acidifiant restreint le grain permettra d’amener le pH dans la zone recherchée

Inversement pour éviter une acidification trop importante avec des malts foncés il faudra une eau très tamponnée, (riche en bicarbonates libres) ou augmenter le pouvoir tampon de l’eau utilisée


Il existe plusieurs façons d’ajuster le pH de la maishe :

Pour diminuer le pH : utilisation d’acide ou atténuation du pouvoir tampon par l’ajout de calcium.


-L’utilisation d’acide :
Sont utilisables les acides phosphorique, lactique, chlorhydrique et sulfurique.
L’acide lactique utilisé en grande quantité a tendance à être perceptible au gout.
L’acide chlorhydrique va changer la concentration en chlorures (cf. partie 2)
L’acide sulfurique va changer la concentration en sulfates.
Acides chlorhydrique et sulfuriques sont des acides forts, potentiellement dangereux si utilises en dépit du bon sens…

Diminution du pouvoir tampon par l’ajout de calcium
Il est possible d’utiliser des sels de brassages tels que sulfate de calcium ou chlorure de calcium, ces sels amènent du calcium qui va se combiner avec une partie des bicarbonates libres et diminuer leur participation au pouvoir tampon de l’eau. Comme pour l’utilisation des acides forts ces sels amènent des composés (sulfates ou chlorures) qui vont impacter le gout de la bière.

Augmentation du pH de la maishe :
Pour augmenter le pH de la maishe pour le brassage de bières brunes avec une eau pauvre en bicarbonates une solution efficace est d’amener des ions bicarbonates libres pour augmenter le pouvoir tampon de l’eau, on utilise donc le carbonate de calcium ou encore le bicarbonate de sodium (bicarbonate de soude)

Toutes ces solutions marchent très bien mais présentent quand même quelques inconvénients :

- il faut connaitre la composition de son eau. Les relevés qu’il est possible d’obtenir auprès des différents organismes ne sont en général que des moyennes annuelles.

- en fonction de l’eau de départ il n’est pas possible d’obtenir tous les profils voulus. Impossible par exemple d’obtenir une eau très douce à partir d’une eau riche en carbonate

- les ajustements doivent être faits en direct, il faut donc un pH mètre etalonee ou du papier pH, bien mélanger après chaque ajout d’acide ou de sels, laisser refroidir le prélèvement…

Une autre option existe : construire son eau de brassage pour obtenir le pouvoir tampon adapte au type de biere brassee et obtenir directement le bon pH a l'empattage.


Comment construire son eau de brassage

Plusieurs ions sont importants pour le brassage

Calcium, magnésium et bicarbonates
Ils participent directement au pouvoir tampon de l’eau, sont important pour le métabolisme des levures, ils participent peu au goût du produit final (hormis les effets lies a un pH inadapté), leur concentration est modulable.
Palmer défini les concentrations acceptables pour ces ions :
Calcium 50-200 ppm
Magnésium 10-50 ppm (le malt contient suffisamment de magnésium pour les besoins des levures)
Bicarbonates 0-250 ppm

Sulfates chlorures et sodium
Ne participent pas de façon importante au pouvoir tampon de l’eau mais ont un impact très net sur le gout du produit final. Les ions chlorures ont tendance a mettre en avant le caractère malte, les ions sulfate eux mettent en avant le caractère houblonné et l’amertume. Le rapport entre chlorure et sulfates participe significativement à l’équilibre entre malts et houblon.
Jouer sur la concentration de ces ions permet de moduler le goût de la bière produite.

Encore une fois Palmer défini les concentrations utilisables comme suivent :
Chlorures 0-300 ppm
Sulfates 0-400 ppm
Sodium 0-150 ppm

Une façon d’obtenir une eau adaptée au type de bière voulue est de la reconstruire à partir d’eau osmosee ou distillée et des différents sels de brassage.

-sulfate de calcium
-sulfate de magnésium
-chlorure de calcium
-chlorure de sodium
-carbonate de calcium
-bicarbonate de sodium

Pour déterminer les quantité de sels nécessaire il existe plusieurs utilitaires, la feuille excel de J Palmer est précieuse pour estimer l’AR adaptée, on peut ensuite utiliser les logiciels du style promash pour mesurer la contribution en ion des différents sels, [Objet inconnu]

Pour une bitter anglaise par exemple, on veut une bière ambrée avec une amertume assez nette on va utiliser une eau moyennement carbonatée avec un taux de sulfate assez élevé par rapport aux chlorures
Par exemple : 100 ppm de calcium 10ppm de magnésium, 50 ppm de chlorures, 100 ppm de sulfates 40 ppm de sodium et 130 ppm de bicarbonates.

Pour 30 litres d’eau osmosee il nous faudra d’après promash
- 3g de sulfate de magnésium
- 0,8g de bicarbonate de sodium
-5,5g de carbonate de calcium
-2,5 g de chlorure de sodium
-3,3 g de sulfate de calcium

Il est possible d’augmenter le taux de sulfates si l’amertume perçue est trop douce ou de diminuer ce taux dans le cas contraire.

Les sels sont a ajouter directement a l’empattage, le rinçage des drêches se fait avec de l’eau osmosée, qui a l’avantage de ne pas changer le pH pour ceux qui pratiquent le fly sparge, la partie des sels correspondant a cette eau de rinçage peut être ajoutée directement a l’ébullition

Pour une dry stout on construira une eau riche en bicarbonates équilibrée en chlorures et sulfates…

Reconstruire son eau peut paraitre contraignant (ç’est un peu contraignant …) mais c’est un outil qui permet d’avoir l’eau idéale pour toute une gamme de bières, sans avoir a corriger le pH en direct avec des sels ou de l’acide ou de manière empirique avant le brassage…

Il est évident qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser de l’eau reconstruite pour obtenir une bonne bière et qu’il y a de nombreux facteurs qui ont un impact bien plus direct sur la bière produite (aération du mout, utilisation de starters, refroidissement rapide). Toutefois une attention portée au pH de la maîche, est un premier pas qui a une influence réelle sur la qualité de la bière. Jouer avec les équilibres chlorures sulfates est également un facteur qui permet de travailler le goût du divin breuvage

Références